Extraction

En 1998, Marc Vanrunxt crée le solo Private Collection pour Eva Kamala Rodenburg qui, depuis lors, a souvent dansé dans les chorégraphies de groupe de Vanrunxt (e.a. Raum et showtitle #63 BLACK MARK). Dix ans plus tard, ils se penchent à nouveau sur les questions introspectives et les paradoxes que renferme Private Collection. Bon nombre de toiles et de sculptures se sont frayé un chemin vers la mémoire collective, même si elles appartiennent à des collections privées. La reproduction dans un catalogue, l’affiche, la carte postale, l’image sur l’Internet relèvent toutes du domaine public, mais il n’en va pas de même pour la matérialité de l’objet. Quel est le rapport entre le public et le privé, l’original et la reproduction dans la danse ? À quel point l’accès au théâtre est-il démocratique ? Comment un spectacle de danse, Private Collection par exemple, s’inscrit-il dans l’imaginaire public ? Quelle est la matérialité de ce média éphémère et de qui est-il la propriété ?

Avec Extraction, Marc Vanrunxt ne reconstitue pas le solo de 1998, mais tente de le repeindre, d’en distiller l’essence, de présenter Eva Kamala Rodenburg sous un jour encore plus beau et plus sophistiqué. Son corps devient le plan de projection de nos désirs – on ne la désire pas en tant que personne, mais on convoite l’attention et les soins qui ont modelé cette apparition. La chorégraphie est un moulage, un motif exclusif qui résulte d’un travail sur mesure, un produit de luxe que l’on extrait du danseur avec précision et minutie.

Marc Vanrunxt permet régulièrement des « insertions » de plasticiens ou de musiciens dans son œuvre. Pour Extraction, il travaille avec le photographe David Bergé et la collaboratrice artistique Myriam Van Imschoot. Ils partagent une fascination pour les œuvres monochromes, les surfaces unicolores que l’on ressent – malgré leur abstraction – comme d’autant plus réelles qu’elles ne représentent et ne peuvent devenir rien d’autre que la matérialité qu’elles sont.